Mihail Sebastian, le premier « avocat » de l’épistolier Marcel Proust

Saviez-vous que la toute première étude au monde de la correspondance de Marcel Proust avait été écrite et publiée en 1938 par le Roumain Mihail Seabastian (1907-1945)? Exceptionnel connaisseur de l’œuvre de Proust, l’écrivain Mihail Sebastian lit en original les 1200 lettres connues à l’époque, et publie en 1938 son étude intitulée « Corespondența lui Marcel Proust” (La correspondances de Marcel Proust) aux éditions Revista Fundațiilor (en langue roumaine). Jamais réédité depuis, redécouvert au moment du centenaire de la mort de Proust, traduit et préfacé par Laure Hinckel, publié par Non Lieu, ce texte est une pépite inconnue d’analyse critique dont la finesse et l’acuité n’ont rien perdu de leur éclat, malgré le temps « perdu ».

Les exportés, le récit poignant de Sonia Devillers

Rassemblant des témoignages de sa famille et des mémoires d'écrivains (Mihail Sebastian), se documentant dans des archives (de la Securitate) et auprès d'historiens de référence (Radu Ioanid, Catherine Durandin), Sonia Devillers mène l'enquête et décrit les rouages monstrueux d'un exil forcé, hallucinant, vécu par sa mère et ses grands-parents dans les années 1960 : juifs indésirables dans la Roumanie communiste, ils ont été vendus contre des porcs et autres bêtes, à l'étranger.

Saul Bellow et Norman Manea. Une conversation ininterrompue

Les lecteurs de Ravelstein (Saul Bellow, 2000) ou ceux du Retour du hooligan (Norman Manea, 2003) vont trouver jubilatoire le spectacle des idées qui naissent et l’énergie de la pensée qui s’auto-réfléchit dans cette conversation « ininterrompue » entre deux grands écrivains des Etats-Unis et de l’Europe.

Le pogrom de Iassy dans un roman à l’humour cru : « Les Oxenberg et les Bernstein » de Cătălin Mihuleac.

Jean-Michel Bérard: "Les Oxenberg et les Bernstein est l'un des livres les plus forts que j'aie pu lire ces dernières années. De ceux qui vous marquent pour longtemps, sinon toute votre vie de lecteur. Je l'ai dévoré voici deux ans sous son titre d'origine, « America de peste pogrom » et l'ai redécouvert ces jours-ci dans l'excellente traduction de Marily Le Nir. L'ébranlement que j'en ai reçu est intact."

« La Ville aux acacias » de Mihail Sebastian : roman d’amour culte et légende littéraire

Dans le cocon ouaté d’une famille bourgeoise de la Roumanie des années 1920, Adriana Dunea s’éveille aux soubresauts de sa vie de jeune fille. L’indicible métamorphose se fait haute littérature sous la plume de l’écrivain roumain de culture juive Mihail Sebastian qui a publié "La ville aux acacias" à vingt-huit ans, en 1935. Un météore d’un talent fou, une légende en Roumanie. Traduit en français par Florica Courriol.

La résurrection de Cioran. Sa «moïeutique »

Parmi les dernières approches qui interrogent pertinemment les œuvres du philosophe, l’étude signée par Mihaela-Gențiana Stănișor, La moïeutique de Cioran (Classiques Garnier) ose s’attaquer à un Cioran bifrons et analyser d’une manière intime ce qui différencie la création en langue roumaine et les écrits en langue française. On dit bien d’une manière intime, parce que, maitre-assistante à l’Université Lucian Blaga de Sibiu, au centre de la Roumanie, Mihaela-Gențiana Stănișor, spécialiste de Cioran et de littérature française du XVIIème siècle, a non seulement une grande sensibilité littéraire et un vif esprit analytique, mais bilingue, elle peut décortiquer en mille nuances les « constances et surtout les différences » que connait l’art littéraire de Cioran à travers le changement de langue.

Divagations avec Cioran, le prophète de l’isolement. Deux inédits.

Cioran, exquis compagnon de confinement.

Lorsque, de surcroît, le temps devient un surplus inespéré, l’injonction d’embrasser le chez soi comme la seule frontière sociale admissible retentit hélas comme un écho cioranien par excellence. Mais, jubilation paradoxale, on ne s’ennuie jamais avec Cioran, le prophète de l’isolement. Deux inédits:

Radu Bata, Le blues roumain. Une anthologie insolite de poésies roumaines.

Radu Bata, poète et traducteur, a osé le dire et son hérésie est splendide : « il n’y a pas de hiérarchie dans la poésie ; il n’y a que l’émotion et le plaisir. »
57 de poètes roumains et leurs 100 poèmes, toutes époques confondues, se retrouvent ensemble, dans un caléidoscope poétiquement jubilatoire qui porte bien son nom : Le blues roumain. Anthologie imprévue de poésies roumaines, dans la traduction « inopinée » de Radu Bata, publiée par les éditions Unicité.

« Pour le prix de ma bouche ». Poésie roumaine post-communiste.

Rien que répertorier « les familles » littéraires et leurs poétiques et c’est la vivacité de la poésie roumaine qui saute aux yeux, toutes époques confondues : les poètes sont « postmodernes » ou « fracturistes », « néo-expressionnistes » ou « minimalistes », « hyperréalistes » ou « déprimistes ». De cette « floraison poétique » que la critique « a du mal à cartographier », le traducteur Jan H. Mysjkin transpose en français une belle brochette de 25 poètes roumains d'aujourd'hui.

Matei Vișniec, le Marchand de premières phrases

Désormais, pour écrire un livre, il y a des logiciels et surtout des patchs que l’on colle à même la peau afin de capter nos tressaillements de vie et les transposer en pages couvertes d’une écriture parfois intensément érotique. Une affaire... littéraire, racontée par Matei Vișniec. Troublant.

Troubadours d’une langue à l’autre. Les poèmes de Rodica Draghincescu

Le roumain et le français font l’amour et enfantent. Tout poème de Rodica Draghincescu porte en creux ce mot de passe - l’être e(s)t lettre -, et les mots offrent leurs maux (de pays) en libre-service : 2 en 1, si vous voulez bien, pile et face en même temps, surtout si vous êtes entre deux – deux cultures, deux contrées, deux langues, deux amours, deux âges.

Dictature – mode d’emploi, l’humour en bonus. Un album pétillant de Florentina Postaru et Serge Bloch

Peut-on parler d’un humour d’inspiration roumaine ? Situations cocasses et ironie sans mordant font ressortir le comique absurde de toute une époque. A l’instar de ce délicieux tableau de rue où, en hiver, en prenant exemple sur le couple des dictateurs, tout un chacun baladait fièrement son animal hissé sur la tête : des chapkas de mouton, un renard blanc en guise de jolie coiffe, des lapins blancs qui jaunissent…Florentina Postaru et Serge Bloch signent ensemble un ouvrage pétillant d’esprit, mode d’emploi du quotidien sous un régime totalitaire, raconté à hauteur d’enfant.

#chronique Les Mille et Une Vies d’Eminescu

"Les vies parallèles" de Florina Ilis. D’aucuns vont goûter la romance « de la plus belle des nuits » que la poétesse Veronica Micle et le poète Mihai Eminescu auraient vécue dans leur vie si fulgurante, bénie pourtant par une courte époque de félicité mélancolique. L’imaginaire de chacun est bien servi, on a largement le choix: l'amant, le lunatique, le journaliste, le toqué, le philosophe, le traqué, le poète, le conspué, le réactionnaire, le divinisé montent sur la scène de deux siècles et fomentent le mythe Eminescu...

#chronique Norman Manea ouvre les tiroirs de l’exil

Norman Manea. Le (re)lire et surtout l’écouter : sage et enjoué dans ses interviews, l'écrivain exilé sait évoquer les griffes de sa vie et les sarcasmes de l’Histoire d’une voix chaude et stable, qui fait place tantôt à son humour presque "british", tantôt à sa vulnérabilité lucide, héritage de l’Europe de l’Est...

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